« Des gilden vriend ? »

Publié le par Gévé

C’est la question que posent Pieter de Koninck et ses insurgés flamands dans chaque maison brugeoise qu’ils pénètrent au petit matin du 18 mai 1302.

Cela veut dire «  Amis des guildes ? » (un guilde est un membre de corporation flamande d'artisan, dans le textile principalement).

Si la réponse est négative ou plus simplement si la question n’est pas comprise ou ne peut être correctement répétée car elle est en flamand, tous les occupants de la maison sont tués à coup d’épée ou de pieu.

(Dans certains livres d'histoire, et plus particulièrement flamands, la version est légèrement différente et la phrase à prononcer aurait été "Schild en vriend" - merci à Eric S. pour cette précision).

 

Au total plus de 1500 personnes, principalement les garnisons et des partisans du roi de France, Philippe le Bel, sont assassinées dans leur chambre ce jour-là  à Bruges.

 

Ce massacre, cet espèce de «  Saint-Barthélemy » des Flandres, est appelé, par analogie aux « vêpres Siciliennes » qui virent les français tués et chassés de Sicile 20 ans plus tôt, les « mâtines de Bruges ».

Délicate appellation pour un véritable carnage !matines-de-bruges.jpg

Il faut toutefois rappeler le contexte.

A la fin du XIIIe siècle, le royaume de France est de loin le plus puissant d’Europe grâce en particulier à Philippe Auguste puis à Saint Louis.

Mais à l’aube de XIVe, l’Angleterre et la Flandre commencent à lui faire de l’ombre en s’enrichissant fortement par le commerce du textile.

Les anglais vendent la laine aux communes flamandes comme Bruges, Gand ou Ypres et celles-ci fabriquent des tissus qu’elles revendent dans l’Europe entière.

Pour contrer l’exclusivité de ce commerce avec son ennemi Edouard Ier, roi d’Angleterre, Philippe le Bel impose un gouverneur en Flandre et y envoie même des garnisons.

Les artisans flamands commencent à gronder et aux premières heures du 18 mai 1302, ils passent à l’action et se déroulent alors les fameuses « mâtines de Bruges ».

Philippe le Bel est furieux.

Il prépare ses troupes et envoie deux mois plus tard son armée.

Le 11 juillet 1302 a lieu, près de Courtrai, la célèbre « bataille des éperons d’or » où les chevaliers français sont battus par les milices flamandes qui ramassent sur le champ de bataille les éperons des vaincus en guise de trophée.Bataille_eperons_dor.jpg

C’en est fini du rêve de nos rois capétiens d’annexer les Flandres.

Un compromis sera trouvé quelques mois plus tard lors de la signature du traité de paix d’Athis où Philippe le Bel ne pourra annexer que Lille, Béthune et Douai…. fixant ainsi des frontières de la France qui restent encore les mêmes  sept siècles plus tard malgré de nombreuses tentatives d’envahissement.

 

En revanche en Belgique, les évènements actuels laissent penser que les flamands, à la tête d’une économie forte n’aient pas très envie de la partager avec la population francophone de Wallonie….

 

… Mais de là à penser que des mâtines de Bruges  « modernes » se préparent, il y a, là, un pas que je n’oserai franchir.

Publié dans Evènements

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article