Le Héros des deux mondes
Bien peu des principaux acteurs de la Révolution française lui ont survécu et bien peu sont morts dans leur lit.
Marie-Joseph Paul Yves Roch Gilbert du Motier, Marquis de La Fayette en fait partie.
Il meurt le 20 mai 1834 dans sa chambre à coucher, entouré des siens, des suites d’une infection de la vessie alors qu’il est dans sa soixante-dix-septième année. Il est enterré deux jours plus tard au cimetière parisien de Picpus.
En 2007 on évoque en France la possibilité de transférer ses cendres au Panthéon. Une vive polémique éclata entre les pour et les contre. Ces derniers l’emportèrent.
Le rôle ambigu de La Fayette pendant la révolution puis pendant la restauration a joué en sa défaveur.
Né dans la noblesse de Haute-Loire, orphelin à 13 ans, Gilbert de La Fayette hérite de très gros revenus. A 16 ans il se marie avec la petite fille du duc de Noailles, un des pairs les plus influents du royaume de France.
Toutefois, notre jeune marquis préfère délaisser une place de choix à la cour qui lui aurait garanti une vie confortable pour s'engager dans une carrière militaire. A 17 ans il obtient le grade de général.
Bien plus fier de ce grade que de son titre héréditaire de marquis, il signera désormais ses courriers d’un Lafayette voulant ainsi prouver que sa bravoure ne vient pas de sa particule nobiliaire.
En 1775, à l’âge de 18 ans, il s’embarque contre l’avis du Roi et en utilisant sa propre fortune, pour les Amériques où il va prêter main forte aux insurgés indépendantistes contre les Anglais.
Il se lie d’amitié avec Georges Washington et Benjamin Franklin.
Il contribue avec ses hommes, qu’il paye de ses propres revenus, à plusieurs victoires dont la décisive bataille de Yorktown, qui conduira plus tard (en 1783) à la déclaration d’indépendance des Etats Unis.
A 25 ans, lorsqu’il rentre en France, il devient un héros aux yeux des français et, fort de cette popularité, il va tenter de faire passer les idées démocrates qu’il a embrassées en Amérique.
Lorsque la révolution française éclate en 1789, il en devient un homme fort mais il se place alors dans une situation délicate : Il est à la fois en faveur de la révolution mais également attaché à la monarchie et à la famille royale qu’il protège.
Il s’attire ainsi à la fois les foudres de l’opinion publique et celles des partisans de la royauté.
Parce qu’il n’a pas voulu choisir « son camp », parce qu’il a fait preuve de pas mal de maladresses politiques, il se voit contraint de fuir le pays pour éviter la guillotine.
Il n’y reviendra qu’après l’empire (Napoléon ne l’aimait pas), sous la restauration où là encore ses idées démocrates le feront basculer dans l’opposition malgré son attachement à la monarchie.
Si nous avons du mal en France à honorer le général Lafayette, comme il préférait se faire appeler, ce n’est pas le cas aux Etats unis où il est la personnalité française la plus appréciée, et même, à égalité avec Churchill, l’étranger le plus populaire.
La preuve :
- Une montagne et plus de quarante localités portent son nom.
- Sa statue orne l’union square à New York
- une statue se trouve devant la maison blanche à Washington
- Plusieurs squares ont son nom à Saint Louis, Washington ou Los Angeles entre autres.
- Chaque 4 juillet, jour de l’indépendance américaine, une gerbe est déposée sur sa tombe au cimetière de Picpus par l’ambassadeur des États-Unis en France.
- Et surtout, en 2002, il devient l’une des 7 personnalités étrangères à avoir été élevé au titre de Citoyen d’honneur des Etats-Unis d’Amérique.
En France, quelques statues et quelques rues, dont une à Paris et une frégate portent son nom.
On voit là directement le déséquilibre de reconnaissance entre les deux pays pour celui qu’on surnomma « le héros des deux mondes ».
Moi-même, comme tout le monde d’ailleurs, je reconnais sans discussion aucune le héros de l’indépendance américaine mais j’ai plus de mal avec celui de la révolution française.
Pourtant, par cet article, je tiens réellement à lui rendre hommage pour le seul héritage – avec la cocarde tricolore – qu’il nous a apporté durant cette période.
Mais quel héritage ! Pour moi le plus beau et le plus symbolique de la révolution :
- La déclaration des droits de l’homme et du citoyen.