Le pionnier des airs
Wimereux (près de Boulogne-sur-Mer), le 15 juin 1784.
Des centaines de personnes restent médusées et horrifiées.
Devant eux vient de se produire la première catastrophe aérienne de l’histoire.
L’aérostat piloté par François Pilâtre de Rozier secondé par le physicien Pierre Romain s’est écrasé sur le sol à quelques mètres du rivage après une chute de près de 1500 mètres.
Quand on évoque les pionniers de l’aviation on pense immédiatement à Clément Ader, aux frères Wright ou encore à Alberto Santos-Dumont.
Pourtant le premier « aéronaute » de l’histoire est bel et bien Pilâtre de Rozier.
En effet la conquête des airs ne commence pas au début du XXe siècle et avant d’inventer des machines plus lourdes que l’air capables de s’envoler, les hommes de tout temps ont toujours cherché à défier les lois de la gravité.
Et c’est ainsi que le 4 juin 1783, à Annonay, les frères Montgolfier font voler le tout premier aérostat à plus de 100 mètres d’altitude durant une bonne dizaine de minutes.
En septembre ils réussissent même le premier « vol habité » (d’un coq, d’un canard et d’un mouton) depuis la cour du château de Versailles.
Toutefois, ils ne trouvent aucun être humain assez téméraire pour s’élancer dans les airs à bord de leur engin gonflable.
Arrive alors un jeune mosellan passionné de physique et d’aéronautique : François Pilâtre de Rozier. Il a 29 ans et propose ses services aux frères Montgolfier.
Après quelques tests réussis les 15 et 17 octobre, Pilâtre de Rozier devient officiellement le premier homme à voler le 21 novembre 1783.
Ce jour-là, il prit place à bord de la nacelle avec François Laurent d’Arlandes et effectua la traversée de paris d’Ouest en Est (des jardins de la Muette à la Butte-aux-cailles) en une vingtaine de minutes.
Dès lors, Pilâtre de Rozier ne va cesser de vouloir « améliorer » l’aérostat pour en faire un véritable moyen de déplacement.
En juin 1784, à bord de son ballon « Marie-Antoinette », devant les rois de France et de Suède, il va monter jusqu’à 3000 mètres d’altitude, au-delà des nuages, là où aucun homme n’a pu aller, puis il parcourra plus de 50 km avant de se poser 45 minutes plus tard.
En octobre 1784, Pilâtre de Rozier élabore le projet de traverser la Manche depuis la France vers l’Angleterre.
Pari audacieux, car les vents sont contraires dans ce sens. D’ailleurs, son concurrent américain, John Jeffries, va tenter et réussir à traverser la manche en janvier 1785 mais dans le sens Angleterre-France.
Pour mener à bien son projet, notre pionnier français va donc devoir affronter des vents contraires. L’autonomie du ballon étant limitée (ou alors il faudrait amener à bord une quantité de paille astronomique pour l’alimenter, ce qui est impossible), Pilâtre va devoir créer un nouveau concept de montgolfière ajoutant à l’air chaud du gaz hydrogène.
Le 15 juin 1785, à Wimereux, bien que le temps fût incertain, il embarque à bord de sa machine avec Pierre Romain.
L’envol s’est effectué sous de bons auspices et bientôt le ballon survole la Manche.
Mais brusquement le vent change de direction et une rafale rabat l’engin sur la côte. Le taffetas de l’enveloppe se déchire et s’embrase. L’appareil et l’équipage tombent comme des pierres et la chute de 1500 mètres ne laisse aucune chance aux pionniers des airs.
C’est à priori, l’alliance air chaud-gaz imaginé par Pilâtre du Rozier qui serait la cause de cet accident. Il fut victime de sa quête à vouloir sans cesse perfectionner cet art qu’est l’aéronautisme.
C’en est ainsi toujours avec les hommes, l’individu paie la gloire qu’acquiert l’espèce.